Façonner l'avenir de l'art interactif
Comment l'entreprise canadienne Iregular établit des liens mémorables entre les gens et l'espace public
Utiliser ses mains pour créer des oiseaux, des poissons ou des criquets virtuels et interagir avec eux.
Ouvrir la bouche et voir son avatar régurgiter des déchets. Fermer ensuite la bouche et voir des plantes générées par ordinateur pousser à travers ces déchets et s’approprier l’espace.
Prendre des poses et voir des icebergs numériques sortir de son corps et s’éloigner en flottant.
Utiliser la lampe de poche de son téléphone intelligent pour regarder des photos de l’environnement ou de célébrités.
Ces scènes semblent être tout droit sorties d’un film de science-fiction ou d’un jeu vidéo, mais elles décrivent aussi ce qui se passe pendant Créatures, Produits, Icebergs et Télescopes, les 4 expériences interactives qui composent Notre Habitat Commun, une nouvelle exposition d’art public. Cette exposition sera vue pour la première fois en dehors de l’Amérique du Nord lorsqu’elle sera dévoilée le 10 février prochain à l’Expo 2020 Dubaï.
Une personne à Montréal interagit avec le chapitre sur les icebergs de Notre Habitat Commun d'Iregular, une installation artistique interactive qui fera ses débuts en dehors de l'Amérique du Nord pour la première fois lorsqu'elle sera dévoilée à l'Expo 2020 Dubaï le 10 février 2022. Crédit : Studio Iregular
« Notre Habitat Commun est un voyage interactif en 4 chapitres qui utilise l’intelligence artificielle et la vision par ordinateur pour suivre le mouvement et le comportement des personnes qui interagissent avec de grands écrans multimédias », explique Éloi Beauchamp, PDG d’Iregular. Ce studio d’œuvres de nouveaux médias situé à Montréal, au Québec, a créé l’œuvre d’art qui a fait ses débuts à Montréal en octobre 2021 et qui a été exposée à Chicago.
« L’idée était d’utiliser l’art visuel interactif pour sensibiliser les gens à notre incidence sur l’environnement », explique M. Beauchamp. « Dans Produits, par exemple, vous vous amusez à interagir avec une œuvre, mais vous voyez ensuite une représentation de vous-même régurgitant des montagnes de déchets, ce qui fait réfléchir aux ordures que nous produisons. »
M. Beauchamp nous en dit plus sur Iregular, y compris sur la façon dont l’entreprise s’est implantée dans les Émirats arabes unis, sur la façon dont sa technologie de pointe l’a aidée à survivre à la pandémie de COVID 19 et sur ce qui l’attend.
Les débuts d’Iregular
J’ai rencontré Daniel Iregui, fondateur et directeur de la création d’Iregular, en 2018, et j’ai trouvé son art fantastique. Mon intention était qu’il se joigne à l’équipe de l’Éloi, la maison de production que je dirige, mais nous sommes plutôt devenus partenaires en 2020. Depuis, nous avons transformé ce qui était à l’origine un petit studio en une entreprise en pleine croissance.
Les activités d’Iregular pendant la pandémie
Deux semaines après que Daniel et moi soyons devenus partenaires, la pandémie a frappé. Pour un studio d’œuvres de nouveaux médias qui met l’accent sur l’art public, ce n’était pas une bonne nouvelle. Heureusement, nous venions de recevoir une subvention du Fonds des médias du Canada. Nous avons donc décidé de consacrer du temps à solidifier l’entreprise le plus possible pour septembre 2021, date à laquelle nous croyions que le monde rouvrirait ses portes. Pendant l’année et demie qui a suivi, nous avons dressé notre catalogue et développé notre technologie, et nous avons continué à rencontrer des gens. Nous avons carrément passé 18 mois sur Zoom, parlant à des milliers de personnes partout dans le monde : artistes, organisateurs d’événements culturels, politiciens, délégués commerciaux, représentants de galeries d’art et de musées.
L’accent mis par Iregular sur l’art public et interactif
Daniel a toujours repoussé les limites de l’art interactif. Par exemple, comment pourrait-il être présenté à longue distance? Et être sans contact? Et permettre la présence de plusieurs utilisateurs? Il pensait déjà à tout ça avant la pandémie, alors quand nous avons compris les répercussions de la COVID 19, nous nous sommes dit : « Ça y est, la création de ce genre de technologie prend maintenant tout son sens! »
Cursor, la technologie développée par Iregular pendant la pandémie
Cursor est un système de suivi à longue portée et sans contact qui utilise l’optique, la vision par ordinateur et l’intelligence artificielle pour transformer n’importe quelle surface en un écran interactif multi utilisateurs. Avec seulement un ordinateur, une caméra et le logiciel Cursor, nous pouvons suivre la lumière émise par la lampe de poche d’un téléphone intelligent ainsi que les mouvements du corps, des mains et du visage. Cette technologie est utilisée dans Notre Habitat Commun et dans 2 autres installations, Anticorps et Points en Commun. L’ensemble du système peut être commandé à distance. Pendant la pandémie, nous avons présenté des spectacles en Corée du Sud et en Australie, et tout ce que nous avions à faire était d’expédier le matériel. Quelqu’un d’autre l’installait et nous le réglions à distance, ce qui nous permettait de participer sans nous déplacer.
Le caractère canadien de Notre Habitat Commun
Les changements climatiques et la dégradation de l’environnement ne sont pas seulement des problèmes canadiens : il s’agit de problèmes mondiaux. Je crois que le Canada est à l’avant-garde de la discussion sur le climat à l’échelle mondiale et qu’il a pris l’initiative de résoudre le problème. Et d’une certaine manière, c’est ce que souligne Notre Habitat Commun. Mais l’œuvre montre également que le Canada, et plus particulièrement Montréal, est une plaque tournante mondiale de l’art interactif et de l’intelligence artificielle. Le reste du monde sait que le Canada est un chef de file dans ces domaines.
Comment Iregular s’est-elle démarquée aux Émirats arabes unis?
Nous sommes allés à la Dubaï Design Week en novembre 2020 pour présenter Anticorps et Points en Commun, et nous avons fini par remporter le prix de la meilleure exposition pour Anticorps. Cette récompense nous a donné une grande visibilité et nous a aidés à nous tailler une place dans les Émirats arabes unis. Nous avons ensuite parlé à d’autres personnes sur place, y compris à des membres du Service des délégués commerciaux du Canada, et nous avons lancé l’idée de présenter Notre Habitat Commun à l’Expo 2020. Et nous voici!
Deux hommes expérimentent Points en Commun pendant la Dubaï Design Week en 2020. L'installation artistique interactive était l'une des deux œuvres qu'Iregular a présentées lors du festival annuel.
Crédit : Studio Iregular
Un homme se tient devant Anticorps pendant la Dubaï Design Week en 2020. L'installation artistique interactive était l'une des deux œuvres qu'Iregular a présentées lors du festival annuel. Crédit : Studio Iregular
Comment le gouvernement du Canada a-t-il contribué à la réussite d’Iregular?
Les ressources disponibles m’ont étonné. Le Fonds des médias du Canada était à l’origine du projet, mais les délégués commerciaux canadiens dans les Émirats arabes unis ont également joué un rôle important. Ils nous ont ouvert des portes, ont mis leur expertise du marché à profit, ont organisé des réunions et ont assuré le suivi avec des clients potentiels. Quand la machine des délégués commerciaux se met en marche, c’est génial! Nous n’aurions pas pu faire tout ce que nous avons fait aussi rapidement sans le soutien du gouvernement du Canada.
L’avenir d’Iregular aux Émirats arabes unis et au-delà
Deux autres de nos installations, Omniprésence et Forward, sont exposées au Pavillon du Canada à l’Expo 2020 jusqu’à la fin de l’exposition. En outre, nous avons récemment exposé pendant un mois une autre de nos œuvres, Control No Control, lors du Festival d’art islamique de Chardjah. L’Expo 2020 est une formidable occasion de présenter notre travail aux Émirats arabes unis et à la région du Golfe, mais je crois que la croissance que nous avons connue ne sera rien en comparaison avec ce qui nous attend. L’intérêt pour nos projets est actuellement très fort partout dans le monde. C’est comme si nous marchions dans le désert avec des seaux remplis d’eau : tout le monde sait que nous sommes là et tout le monde veut ce que nous offrons. C’est une position idéale pour nous.
Control No Control d'Iregular à Sharjah, aux Émirats arabes unis. L'installation artistique interactive a été présentée pendant un mois au Festival d'art islamique de Sharjah en janvier 2022. Crédit : Studio Iregular
Une femme tend la main pour toucher Control No Control au Festival d'art islamique de Sharjah. Crédit : Studio Iregular
Notre Habitat Commun peut être vu sur la scène Soleil d'Expo 2020 Dubaï du 11 février au 25 mars 2022.